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l
Neurone
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Vol 17
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N°2
·
2012
l'accès successif au code sémantique puis
au code syntaxique dépendant de régions
supérieures et moyennes du cortex tem-
poral. Par ailleurs, l'accès au code pho-
nologique dépend de régions corticales
plus postérieures au niveau de la jonction
temporo-pariétale englobant la région de
Wernicke. Enfin, l'accès aux phonèmes et
l'encodage phonologique dépendent de
régions frontales impliquant notamment
le cortex frontal postéro-inférieur qui
comprend l'aire de Broca.
Les aphasies primaires progressives sont
donc des véritables maladies neurodégé-
nératives du langage touchant avec prédi-
lection les régions corticales temporales et
frontales, ce qui explique qu'elles sont
classées parmi les dégénérescences lo-
baires frontotemporales. D'après les
critères diagnostiques, l'atteinte du lan-
gage reste isolée pendant au moins deux
ans avant de s'étendre dans la plupart des
cas à d'autres fonctions cognitives pouvant
intéresser les processus exécutifs, la mé-
moire, les praxies ou le calcul. Le début de
ce type de maladie se situe habituellement
entre 50 et 65 ans avec une prévalence de
7/100.000, ce qui correspond à environ
770 malades en Belgique. Des formes gé-
nétiques sont rares mais impliquent pour
la plupart des mutations au niveau du gène
de la progranuline. La médiane de survie
peut être évaluée à environ 10-15 ans.
Les APP font partie des atrophies focales
neuro-dégénératives avec trois formes
possibles, évoluant cependant toutes
vers le mutisme:
·
l'APP non fluente;
·
l'APP fluente et sémantique;
·
l'APP logopédique.
L'APP non fluente est caractérisée par un
discours laborieux qui ne respecte pas
les règles de la grammaire (agramma-
tisme) ou qui contient des substitutions,
des inversions de phonèmes et de syl-
labes. Il existe un grave trouble de la
construction des phrases. Par contre, la
compréhension est intacte.
La forme fluente et sémantique est car-
actérisée par une atteinte du sens des
mots et des difficultés à produire des
mots appropriés au contexte (manque du
mot, paraphasies) et à comprendre le
sens des mots entendus et écrits, avec
des troubles de la reconnaissance des
visages, des difficultés de compréhen-
sion de la signification des objets. C'est
cette atteinte globale intéressant plu-
sieurs domaines cognitifs qui a donné
naissance au concept plus vaste de dé-
mence sémantique.
Enfin, la forme logopédique se définit
par un manque du mot qui est caractéri-
sé par le phénomène du «mot sur le bout
de la langue». Les patients connaissent
le sens du mot à produire mais ne par-
viennent pas à trouver sa forme sonore et
écrite, ce qui engendre de multiples
pauses au sein du discours.
Les atteintes structurelles de chacune
des trois formes d'APP comportent une
atteinte atrophique du cortex hémi-
sphérique gauche, se distinguant par
leur localisation. L'APP non fluente est
liée à une plage d'atrophie intéressant
principalement le cortex frontal inférieur
englobant la région de Broca. La forme
fluente et sémantique est sous-tendue
par l'atteinte du cortex temporal anté-
rieur et pour certains auteurs même, du
cortex temporal inférieur et moyen. La
forme logopédique résulte de l'atteinte
du cortex temporal externe postérieur
empiétant sur le cortex pariétal inférieur
et englobant l'aire de Wernicke.
Des altérations mnésiques en mémoire
de travail et mémoire épisodique peu-
vent survenir au décours, mais le trouble
du langage reste à l'avant-plan (2).
Quant à l'atteinte anatomopathologique,
elle reste peu connue même si plusieurs
travaux ont montré l'implication de deux
types de lésion:
·
dans 2/3 des cas, on observe des in-
clusions intraneuronales tau-posi-
tives ou ubiquitine-positives comme
retrouvées dans les démences lo-
baires frontotemporales;
·
par ailleurs, pour 1/3 des cas, on re-
trouve une dégénérescence neurofi-
brillaire et des dépôts bêta-amyloïdes
s'organisant en plaques séniles com-
me dans la maladie d'Alzheimer.
Il semble que la forme non fluente est
majoritairement sous-tendue par des lé-
sions tau-positives alors que la forme
fluente et sémantique est caractérisée
par des lésions ubiquitine-positives et
enfin, la forme logopédique par des
lésions de type alzheimérisé.
La détection attentive des patients souf-
frant d'APP avec si possible la caractéri-
sation nuancée des patients mèneront
sans doute à une réévalution du taux de
prévalence, qui semble actuellement
sous-estimé. De plus, elles permettront
de définir plus rapidement les modalités
de la prise en charge et d'éviter ainsi des
erreurs de diagnostic qui durent parfois
plusieurs années.
L'atteinte du langage reste
isolée pendant au moins
deux ans avant de s'étendre
dans la plupart des cas à
d'autres fonctions cognitives.
On a trouvé une corrélation
positive entre la dose totale
reçue de L-dopa et la perte
neuronale dans la partie
ventrale de la Substance
Noire.